Telle est peut-être une de vos résolutions pour l’année 2024. Parce que quand on sait, selon une étude de l’ADEME parue en 2016, que 10 millions de tonnes de produits sont perdus et gaspillés en France chaque année, que cela représente 16 milliards d’euros en valeur théorique. Quand on sait également que l’empreinte carbone des pertes et gaspillages représente 15,3 millions de tonnes équivalent CO2, « soit 3 % de l’ensemble des émissions de l’activité nationale ou encore 5 fois les émissions liées au trafic aérien intérieur ».
Et qu’au niveau mondial, c’est « un tiers de la production alimentaire destinée à la consommation humaine dans le monde [qui] est perdue ou gaspillée, atteignant environ 1,3 milliards de tonnes par an », selon une étude de la FAO. Et que, toujours selon la FAO, « si le gaspillage alimentaire était un pays, il serait le 3ème plus grand émetteur de gaz à effet de serre après les États-Unis et la Chine »…
Tout cela fait réfléchir.
Pertes et gaspillages alimentaires, l’affaire de tous
D’autant plus que tous les acteurs de la chaîne alimentaire sont concernés par les pertes et gaspillages alimentaires. Il faut savoir qu’au stade de la production, de l’après-récolte et de la transformation, on parlera de « pertes ». Le terme « gaspillage alimentaire » n’est lui utilisé qu’au stade de la distribution, des métiers de bouche, de la restauration et de la consommation des ménages.
Toujours selon l’étude de l’ADEME, si l’on regarde la répartition des pertes en poids, les producteurs et les transformateurs génèrent respectivement 32% et 21% de pertes tandis que les distributeurs ont une part représentant 14% de gaspillage alimentaire. Quant à nous autres consommateurs, notre part de gaspillage alimentaire s’élève à 33%. Si on compte l’ensemble de la filière, depuis le producteur jusqu’au consommateur, on arrive à 155 kg d’aliments perdus et gaspillés par an et par personne, soit 1/5 de la production agricole.
Sceptique quant aux pertes et gaspillage « de la fourche à la fourchette » ou encore « de l’étable à la table » ? Je vous laisse découvrir cette vidéo de l’ADEME qui explique notamment les pertes et gaspillages alimentaires en suivant les péripéties d’une pomme de terre destinée à devenir des frites surgelées.
Abondance et perte de valeur, causes du gaspillage alimentaire
En France et dans les pays développés en général, la sécurité alimentaire est de mise. La quasi-totalité de la population française mange aujourd’hui à sa faim et de ce fait la fonction vitale de la nourriture tend à être oubliée. Après tout, l’époque des rationnements est de l’histoire ancienne et la dernière grande famine en Europe occidentale – « la famine de la pomme de terre » – a touché principalement l’Irlande au milieu du XIX° siècle.
Or, quand on a faim, la nourriture revêt une valeur infinie. Impossible de gaspiller la moindre miette pour un homme, une femme ou encore un enfant tenaillés par la faim. Mais nous, nous sommes dans une situation d’abondance sans compter sur le fait que la valeur économique de l’alimentation a diminué en cinquante ans de consommation alimentaire. Ainsi, d’après une étude de l’INSEE, en France, la part du budget dédiée à l’alimentation n’a cessé de diminuer depuis les années 1950. En effet, elle représentait 35% du budget de consommation en 1960 contre 20% en 2014.
Nous gaspillons des denrées alimentaires car nous ne leur accordons plus la même valeur qu’auparavant. Nous gaspillons des denrées alimentaires car nous avons perdu notre rapport à la terre et nous avons une vision déshumanisée de la filière agro-alimentaire.
Mais tout cela a un coût. D’un point de vue financier, « les pertes et gaspillages qui sont générés au stade de la consommation représentent environ 108 € par an et par personne et s’élèvent à 240 € par an et par personne si l’on considère l’ensemble des pertes et gaspillages générés tout au long de la chaîne rapporté à la population française ».
Et ce sentiment de « jeter l’argent à la poubelle » est exacerbé par l’inflation. C’était déjà le cas lors de la crise financière de 2008 puisque la prise de conscience du gaspillage alimentaire par la société française a eu lieu à cette période. C’est encore plus vrai aujourd’hui où le budget alimentaire est une variable d’ajustement afin de s’adapter à la hausse des prix des produits (25% en deux ans).
Mais alors, comment en finir avec le gaspillage alimentaire ?
Alors si pour vous le gaspillage alimentaire est une préoccupation et ce quelle que soit votre motivation (financière, écologique, sociale, éthique, …) et que vous ne savez pas par quel bout commencer, voici quelques résolutions pour bien débuter l’année 2024.
Résolution n° 1 : J’achète de façon raisonnée et responsable
#1 J’établis les menus de la semaine et réalise ma listes de courses
En planifiant les menus de la semaine et donc en faisant une liste de courses, vous résistez à la tentation d’achats compulsifs et ne succombez pas aux offres promotionnelles. Vous avez une vision éclairée de ce que vous aller manger durant la semaine, des aliments que vous n’avez pas en stock et qui vous sont nécessaires.
Si vous êtes en panne d’idées de recettes et que vous souhaitez vous simplifier la réalisation de votre liste de courses, pensez à une application de planification alimentaire telle que JOW.
Et quand vous faites vos courses, n’oubliez pas d’avoir le ventre plein car même si cette règle prête à sourire, faire ses courses en ayant faim pousse naturellement à remplir davantage son caddie.
#2 J’adapte mon régime alimentaire
… en réduisant ma consommation de viande, de produits laitiers, de plats préparés et boissons sucrées et de sodas.
Réduire sa consommation de viande et de produits laitiers permet de réduire l’impact de son alimentation car pour produire 10 calories animales, 100 calories végétales sont nécessaires. En consommant directement les protéines végétales, vous réduisez une étape intermédiaire en ingurgitant des aliments sains et nécessitant peu d’engrais. Les plats préparés nécessitent l’intervention de nombreux acteurs rendant complexe et coûteuse en énergie la chaîne alimentaire sans compter les risques de pertes multipliés tout au long de la chaîne. Quant aux boissons sucrées et sodas, ils font grimper notre taux de cholestérol et sont volumineux à transporter.
#3 J’achète des fruits et légumes de saisons, locaux et bios de préférence
Privilégier les circuits courts et de proximité permet de simplifier la chaîne d’approvisionnement car plus elle devient complexe, plus les risques de perte augmentent. Et acheter de saison et bio permet d’avoir une agriculture raisonnée et respectueuse des ressources naturelles.
#4 J’achète à la découpe ou en vrac
En achetant à la découpe ou en vrac, vous êtes certain d’acheter la juste quantité nécessaire. Cela peut ainsi avoir encore plus de sens pour une personne célibataire.
#5 Je fais attention aux dates de péremption avant d’acheter
Apprendre à décrypter la différence entre la Date Limite de Consommation (DLC) et la Date de Durabilité Minimale (DDM) permet de mieux maîtriser sa consommation alimentaire.
La DDM est traduite par la mention « à consommer de préférence avant le… ». On la trouve sur des aliments peu périssable (produits d’épicerie, conserves et surgelés). Elle signifie que l’aliment peut être consommé après cette date sans risque pour votre santé mais il risque de perdre certaines de ses propriétés (odeur, goût, texture, couleur…).
La DLC est identifiable grâce à la mention « à consommer jusqu’au… / avant le… ». Elle concerne les produits très périssables comme le lait frais, la viande, le poisson, les plats préparés réfrigérés, etc. Il ne faut pas dépasser cette date car dans ce cas, il y aurait un risque pour votre santé.
Certains magasins proposent parfois des produits avec une DLC courte. Il ne leur reste plus beaucoup de temps avant leur date de péremption, mais ils sont encore parfaitement consommables jusque là. Si vous savez que vous allez pouvoir les consommer rapidement, ne les boudez pas… et en plus ils bénéficient d’une offre promotionnelle.
#6 Je donne une chance aux fruits et légumes « moches »
Ne pas hésiter à acheter des fruits et légumes un peu tordus, moches ou non calibrés permettra, à votre échelle, de faire évoluer les normes de calibrage encore en vigueur dans bon nombre de magasins alors que ces normes ne sont plus imposées par l’Union Européenne depuis 2009.
Vous pouvez également vous rendre chez les producteurs locaux où vous pourrez en trouver facilement. C’est un excellent moyen d’éviter les pertes des petits producteurs tout en valorisant les circuits courts.
Résolution n° 2 : Je cuisine différemment
#7 J’apprends à doser mes aliments
… pour cuisiner au plus juste, y compris quand vous recevez, et éviter de ce fait toute forme de gaspillage ou encore des restes qui s’accumulent dans votre réfrigérateur.
Vous n’avez strictement aucune idée de la bonne dose ? Voici les quantités moyennes à appliquer pour une personne adulte en fonction de différents aliments :
→ Légumes : 200 g
→ Laitue : un bol (type bol de céréales)
→ Lentilles : 3 cuillères à soupe bien remplies
→ Céréales (semoules, boulgour, polenta, blé, …) : 60 g
→ Riz : 60 g
→ Pâtes : 80 g en plat principal et 40 g en accompagnement
→ Poisson : 140 g
→ Viande : 150 g et 200 g avec os
→ Brocolis : 2 « bouquets »
→ Pommes de terre : 5 pommes de terre moyennes ou 2 grosses pommes de terre (soit environ 240 g)
→ Fromage : 30 g
#8 Je cuisine les produits qui vont bientôt se périmer en priorité
Et pour se faire, n’hésitez pas à ranger les produits selon la règle du «premier entré, premier sorti». En d’autres termes, vous devez placer à l’avant de votre réfrigérateur les produits qui sont à consommer rapidement. Vous éviterez d’avoir des aliments périmés dans le fond de votre réfrigérateur.
#9 J’accommode les restes
Normalement, en dosant convenablement vos repas, vous ne devriez pas ou avoir peu de restes de plats déjà entamés. Mais on trouve également dans nos déchets alimentaires des fruits et des légumes qui commencent à dépérir, des épluchures de légumes ou des fanes qui pourraient être consommées. Alors que faire pour réduire vos déchets alimentaires de façon significative ? En pratiquant l’art de cuisiner les restes. Et si jamais vous ne savez quoi faire avec ce qu’il vous reste dans votre réfrigérateur, vous pouvez utiliser l’application Frigo Magic qui vous permettra de limiter le gaspillage en vous proposant des idées de recette.
Et quand vraiment, il n’y a pas de solution, n’oubliez pas de composter les restes qui ne peuvent plus être mangés !
Résolution n° 3 : J’évite de jeter et j’apprends à mieux conserver
#10 Je congèle les surplus ou les aliments avant leur date de péremption
La congélation est utile pour éviter de jeter les aliments ayant une DLC courte ou quand vous ne prévoyez pas de cuisiner les restes à très court terme. En congelant les aliments en les mettant dans des sachets de congélation ou dans des boîtes hermétiques, vous préservez leur qualité nutritionnelle et gustative.
Quant à la décongélation des aliments, elle doit se faire idéalement dans le réfrigérateur sous forme de décongélation lente. On peut aussi effectuer une décongélation au micro-ondes ou dans de l’eau froide mails il faut éviter de les laisser à température ambiante ou de les décongeler en les plongeant dans de l’eau chaude. Bien évidemment, on évite de recongeler des aliments qui ont été décongelés (sauf s’ils ont été cuisinés entre temps).
#11 Je range convenablement mes aliments dans mon réfrigérateur
En préambule lorsque vous faites vos courses, vous avez respecté la chaîne du froid en remplissant votre caddie avec des produits secs, puis du frais et enfin les surgelés mis dans un sac isotherme. Ces précautions sont utiles afin d’éviter le développement de bactéries qui pourraient vous amener à jeter ces aliments ou au pire à attraper une intoxication alimentaire.
Une fois chez vous, vous devez penser à la règle « Premier arrivé, premier sorti » en rangeant les aliments de la semaine dernière en tête de votre réfrigérateur (et de vos placards d’ailleurs).
Et pour conserver au mieux vos aliments, n’oubliez pas d’emballer les denrées au préalable et de les ranger par température. Les produits laitiers devront être situés dans le haut du réfrigérateur. Placez dans le compartiment du dessous les viandes, poissons, produits en cours de décongélation et plats cuisinés. Les fruits et légumes cuits, et légumes frais se rangent dans le bac à légumes. Quant aux beurre, œufs et boissons, ils iront dans la porte.
Enfin, afin d’éviter le développement de bactéries, pensez à nettoyer régulièrement votre réfrigérateur.
#12 Je pense à la conservation à température ambiante
En effet, la plupart des fruits, et certains légumes, comme les tomates, les melons ou les poivrons ne se conservent pas au réfrigérateur.
Les herbes aromatiques se portent bien les tiges dans un verre d’eau à l’air ambiant.
Il en est de même des poireaux, brocolis, oignons nouveaux, céleri, blettes, artichauts et autres salades qui se conservent plus longtemps à l’air libre… les pieds dans l’eau.
Les pommes de terre se conservent à l’abri de la lumière et loin des oignons, si possible dans un endroit frais et sec avec une ou deux pommes dans le bac de pommes de terre afin de ralentir leur germination.
Dans tous les cas, pour éviter de gaspiller vos fruits et légumes, il faudrait idéalement les consommer dans la semaine qui suit leur achat.
Résolution n° 4 : J’agis collectivement contre le gaspillage alimentaire
#13 Au restaurant, je pense à demander un Gourmet bag, doggy bag à la française
Depuis le 1er juillet 2021, les restaurants et débits de boissons à consommer sur place doivent fournir à leurs clients qui en font la demande des contenants réutilisables ou recyclables pour qu’ils puissent emporter le reste de leur repas. Le Gourmet bag est ainsi un excellent moyen pour lutter contre le gaspillage alimentaire des restaurateurs et ce d’autant plus que la moitié du gaspillage généré par les consommateurs a lieu au restaurant.
#14 Je récupère les invendus des commerçants
Tous les jours, les supermarchés, commerces de bouche, épiceries, hôtels, restaurants, … ont des invendus ou des excédents de stocks de produits frais.
Les applications Phenix et Too Good to Go vous mettent en relation avec des commerçants qui vous proposeront des paniers surprises à prix réduit.
Quant à l’application Zéro-Gâchis, elle vous permet d’identifier les grandes et moyennes surfaces qui proposent des promotions sur leur produits proches de leur date limite de consommation.
#15 Je pense à faire un don alimentaire
Vous partez en vacances et vous ne savez que faire de tous vos aliments ? Pensez alors à les donner grâce à l’application HopHopFood et au site Geev.
Crédit Photo
Photo de Juan Pablo Serrano Arenas